Car avant d’occuper cet important poste à New York depuis le 1er juillet dernier, cette médecin-pédiatre a consacré les trois dernières décennies de son existence à la promotion et la protection des droits de l’enfant. D’abord au Maroc, où elle avait notamment fondé l’association Bayti, première ONG marocaine à traiter de la situation des enfants de la rue. Ensuite au niveau international, en occupant en autres, la fonction de Rapporteuse spéciale des Nations-Unies chargée d’examiner les questions se rapportant à la vente d'enfants, à la prostitution des enfants et à la pornographie impliquant des enfants.
Mme M’jid a également travaillé comme experte consultante sur des projets, des stratégies et des politiques nationaux et internationaux liés à la promotion et à la protection des droits de l’enfant, et œuvré avec plusieurs gouvernements, ONGs et organisations intergouvernementales sur cette question.
"C’est vrai que cela fait des années que je me bats pour les droits des enfants, aussi bien au Maroc qu’au niveau mondial. Donc, je vois ce poste comme un instrument réellement au profit des enfants, avec et pour les enfants", explique Mme M’jid dans une interview qu’elle a accordée à la MAP, à New York.
Car, pour elle, cette inclusion reste "très importante pour faire avancer la cause de la prévention de toutes les formes de violences à l’égard des enfants dans le monde". D’où l’intérêt du travail qui se fait au niveau de son bureau avec un réseau d’ONGs aux niveaux mondial et local, pour "garantir que les propositions et la représentativité des enfants sont réellement prises en compte dans les décisions qui les touchent".
"La systémisation de la participation des enfants est aussi un grand enjeu", souligne à ce propos Najat Maalla M’jid, qui est également membre du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) et ancienne Chef du Département de pédiatrie et Directrice de l’hôpital Hay Hassani pour la mère et l’enfant de Casablanca.
"Je suis vraiment dans une démarche pour montrer que c’est possible de lutter et mettre fin à la violence à l’égard des enfants. Car ce n’est pas inévitable. On ne peut pas être fataliste, quelle que soit la culture et la société. Franchement, si on veut vraiment, on peut y arriver", affirme cette militante de longue date et récipiendaire de plusieurs prix et distinctions pour son ferme engagement en faveur de la protection des droits de l’enfant.
A cet égard, la Représentante spéciale du Secrétaire général l’ONU assure que la violence à l’encontre des enfants "n’est pas inévitable". "J’en suis persuadée ! Car j’en ai vu des enfants qui s’en sont sortis, ils sont devenus brillants. Je crois en eux, ils ont une capacité de résilience et de rebondir".
"Vous savez, il existe deux façons de vivre : on peut vivre en critiquant, ou on peut critiquer et agir. Et je pense que c’est ce dernier choix de vie que j’ai fait", confie Mme M’jid, qui se dit indignée par cette "grave" banalisation de la violence visant les enfants à l’échelle mondiale.
"Ce n’est pas normale cette tolérance passive de la violence à l’encontre des enfants (...) Honnêtement, je crois en les enfants. Et si quelque chose peut être faite, c’est bien avec eux que l’on peut la faire", assure encore cette diplômée de l’Université de Bordeaux II et de l’Institut des droits de l’homme de Genève.
Pour ce faire, il faut plus que de la simple volonté. "Il faut agir, aujourd’hui et pas demain. Agir mieux et vite, avec et pour les enfants, pas en parallèle. C’est capital", préconise Mme M’jid, qui recommande dans ce sens "une approche intégrée, globale et intersectorielle centrée sur l’enfant".
Evoquant les prérogatives de son bureau, la Représentante spéciale du Secrétaire général de l’ONU fait remarquer qu’il s’agit d’un "mandat énorme" qui fait suite aux recommandations de l’étude qui avait été faite en 2006 sur la question de la protection de l’enfant, et s’inscrit aujourd’hui dans le cadre de la réalisation des Objectifs de développement durable (ODD).
"Il s’agit d’un mandat fort de mobilisation, de lobbying, de plaidoyer et de networking, tout en œuvrant au niveau mondial pour mettre l’enfant réellement dans l’agenda politique au niveau global, mais aussi régional, et national", explique Mme M’jid, qui, à 60 ans, affiche un dynamisme et une volonté sans faille à persévérer sur la voie de la promotion des droits des enfants.
"C’est un très grand challenge, surtout si on veut atteindre, à l’horizon 2030, l’objectif visant à mettre fin à toute forme de violence à l’égard des enfants dans le monde. Je pense qu’il y a énormément de travail à faire", reconnait-elle.
Najat Maalla M’jid dit également percevoir sa fonction onusienne comme "un outil (…) pour donner plus de visibilité, pas uniquement en parole, mais en actes aussi, aux acteurs qui travaillent contre la violence visant les enfants, que ce soit les Etats, les organisations de la société civile, le secteur privé, le système des Nations-Unies ou les enfants eux-mêmes".
"L’objectif pour moi est de voir aussi où est la valeur ajoutée du mandat, pour faire en sorte de catalyser et pousser à mieux agir afin de voir où l’on peut joindre les forces en matière de plaidoyer et d’action en faveur des droits des enfants".
Ainsi, et dans le cadre de ses fonctions de Représentante spéciale, Mme M’jid mène une large action au niveau mondial, mais aussi sur le plan régional, avec le Conseil de l’Europe, l’Union africaine, et les instances représentatives des pays de l’Asie et de l’Amérique latine, en plus des visites pays pour mener des consultations sur les priorités et stratégies des Etats membres.
"Il s’agit aussi d’un moyen de galvaniser les efforts et identifier des champions qui puissent mobiliser les autres", conclut-elle.