C’est l’idée ingénieuse que le Marocain Anasse Bari et son équipe de recherche au sein de la prestigieuse université de New York (NYU) s’activent actuellement à traduire en réalité sur le terrain pour donner plus de visibilité aux médecins et aux hôpitaux face à la maladie du siècle.
Professeur d'informatique et d’analyses prédictives - une forme d’IA - au "Courant Institute" de la NYU, qui est classé n°1 dans le monde en recherche mathématique appliquée, Anasse Bari a pu développer un outil permettant de signaler la gravité clinique des malades du COVID-19 afin d’aider les médecins à déterminer quels patients ont réellement besoin de lits dans les hôpitaux et ceux qui peuvent rentrer chez eux afin de mieux gérer les capacités hospitalières déjà limitées.
"Lorsque l’épidémie du nouveau coronavirus est apparue en Chine, j'avais prédit qu'elle allait émerger comme une pandémie qui aura un impact sur l'économie mondiale et entraînera de multiples décès dans le monde, pour la simple raison que nous vivons dans un monde interconnecté", confie ce natif de Tanger dans une interview à la MAP, à New York, où il dirige un groupe de recherche sur le développement de l'IA pour lutter contre les épidémies et prédire les marchés financiers.
"Au début du mois de janvier dernier, j'ai réuni et dirigé une équipe composée de médecins et d'informaticiens, et ensemble, nous avons établi un partenariat avec deux hôpitaux chinois pour travailler sur des prédictions sur le coronavirus", raconte le Marocain de 35 ans, expliquant que l’objectif était de concevoir et de déployer des outils d'aide à la décision en utilisant des capacités d'IA, principalement des analyses prédictives, pour prédire les résultats futurs chez les patients atteints de COVID-19.
"Nous espérons que cet outil d'IA, lorsqu'il sera entièrement opérationnel, sera utile aux médecins au moment où ils prédisent les résultats des patients à un stade précoce et évaluent la gravité des cas parmi eux", fait valoir Anasse Bari, qui a été recruté, par ailleurs, comme conseiller par les Nations-Unis pour l'élaboration d'une stratégie mondiale de l'IA pour l’organisation internationale et des conseils sur la façon dont l'IA peut être appliquée pour le bien social.
La finalité, explique-t-il, est d’aider le médecin à prendre des décisions basées sur les données sur la manière d’allouer les ressources au sein des hôpitaux. "Notre objectif est d'aider les médecins et de les doter d'outils d'IA qu'ils peuvent utiliser pour prendre rapidement des décisions basées sur les données".
A cet effet, l’analyse prédictive utilisée par Anasse Bari et son équipe est une technologie qui apprend des expériences passées. "Il s'agit d'un ensemble d'algorithmes qui apprennent des données historiques (expérience) afin de faire des prédictions", explique ce co-auteur d’un best-seller sur l’IA, intitulé "Predictive Analytics for Dummies" (Les analyses prédictives pour les nuls), ouvrage qui fut traduit en espagnol, allemand et chinois.
"Ce que nous concevons en matière de soins de santé est une technologie d'analyse prédictive qui apprend des cas de patients testés positifs pour le coronavirus afin de prédire le comportement futur de nouveaux cas. Ainsi, les médecins auraient une vision de l'avenir de ce qui pourrait arriver à ces patients, et sur la base de ces prédictions, les médecins prendront une décision dans le présent (allocation des ressources, qui reçoit des soins immédiats, autres développements cliniques…)", fait-il valoir.
Anasse Bari, qui a également travaillé auparavant pour la Banque Mondiale et comme conseiller sur des projets de recherche pour des fonds d’investissement (Hedge funds) à Wall Street sur la création d'une nouvelle stratégie d'intelligence artificielle pour la finance, se dit fier de diriger une équipe multidisciplinaires à l'Université de New York composée de chercheurs de différentes nationalités et avec diverses expertises en médecine, en intelligence artificielle et en informatique.
"Notre objectif est vraiment de contribuer à sauver des vies en aidant les médecins", affirme-t-il, précisant que son équipe de recherche se concentre désormais sur le travail et la collaboration avec les principaux hôpitaux de la ville de New York, épicentre de la pandémie de coronavirus aux Etats-Unis.
"Il reste encore du travail et des recherches à faire en termes de déploiement, de validation et d'affinage de l'outil", concède-t-il.