MM. Fábio Albergaria de Queiroz, docteur en relations internationales de l’Université de Brasilia et Guilherme Lopes da Cunha, docteur en économie politique internationale (Université fédérale de Rio de Janeiro) ont indiqué à la MAP que la décision de l’Espagne est de nature "à faire table rase d’un héritage conflictuel depuis la période coloniale" entre les deux pays.
Cette position est pertinente pour deux raisons principales : premièrement parce que peu de gens s’y attendait après l'escalade de tensions entre les deux pays. Deuxièmement, parce qu’en se rangeant du côté du Maroc, l'Espagne, vu son statut d’ancienne puissance colonisatrice, conforte l’approche du Maroc et reconnait son effort diplomatique, ont-ils soutenu dans un commentaire conjoint du message adressé à SM le Roi Mohammed VI par le président du gouvernement espagnol, Pedro Sanchez.
M. Fábio de Queiroz, professeur à l'École supérieure de défense du Brésil et M. Guilherme da Cunha, qui enseigne à l'Ecole supérieure de guerre, estiment que " les liens entre le Maroc et l'Espagne ne se limitent pas seulement à la contiguïté imposée par la géographie qui les relie, mais aussi par la construction d'un partenariat, dont le Sahara serait le trait d’union des destins des deux pays".
Pour les professeurs universitaires, "les intérêts du Maroc sont interconnectés avec ceux de l'Espagne et inversement : si le Maroc trouve une bonne écoute à Madrid, l’Espagne sait qu’elle peut compter sur le Maroc à bien des égards, sur le plan stratégique".
MM. Fábio de Queiroz et Guilherme da Cunha ont dit avoir décelé, dans le message de M. Sanchez à SM le Roi "une certaine réaction méticuleuse au discours royale du 20 aout dernier". A l'occasion du 68e anniversaire de la Révolution du Roi et du Peuple, "le Souverain a souligné l'aggravation non désirée des tensions avec l'Espagne, après l’hébergement sous fausse identité du chef des séparatistes du polisario, qui représentait une menace de déstabilisation au Maghreb et en Europe méditerranéenne".
Il sied dans ce sillage de préciser que l'Espagne est le premier partenaire commercial du Maroc, qui, à son tour, est "crucial dans les efforts de l'Europe pour lutter contre les menaces, telles que le terrorisme et l'immigration clandestine", ont-ils ajouté.
Selon eux, le ton du discours de Sa Majesté le Roi a montré une volonté de progression et d'amélioration, tout en réitérant que, pour l'Espagne et l'Union européenne en général, le Maroc est un interlocuteur essentiel pour la construction de relations au service de l'Europe, mais également du Maroc et de l’Afrique.
"L'Espagne marque une nouvelle conquête diplomatique de Rabat qui vient s’ajouter à d’autres comme la reconnaissance de la marocanité du Sahara par les États-Unis, ou encore la position ferme et inébranlable des pays du Golfe en faveur de l’intégrité territoriale du Maroc", ont fait observer les experts brésiliens.
Avec ces développements, "s'ouvrent des possibilités nouvelles et inédites qui, à en juger par le pragmatisme de la diplomatie marocaine, auront dans la récente reconnaissance espagnole, un facteur décisif pour d’autres percées de Rabat".
Ils ont fait observer que le Maroc diversifie sa coopération avec plusieurs puissances émergentes comme le Brésil, dont le président voit en le Maroc un "partenaire stratégique avec lequel le rapprochement politique ne cesse de croitre".
Ainsi, en résumé, "ces acquis diplomatiques substantiels légitiment le Maroc, à moyen et long terme, pour développer des projets structurants en faveur du développement de l'économie nationale et d'intégration des différentes régions du pays, brisant ainsi les cercles vicieux initiés à l'époque de la domination coloniale qui persiste depuis des décennies comme facteur d'instabilité au Maghreb", selon les universitaires brésiliens.
Les récents succès remportés par la diplomatie marocaine dans la question du Sahara, auprès de pays clés, sont non seulement stratégiques, mais vitaux pour la stabilité du Maghreb et de l'Union européenne, dans une conjoncture d'interdépendances complexes, ont conclu les experts brésiliens.