Par Khalid ATTOUBATA.
Brasília – L'année qui s’écoule aura été de tous les défis pour le Brésil, un pays sud-américain qui a connu des péripéties politiques majeures et des défis environnementaux ayant propulsé le pays au-devant de la scène internationale.
Le dernier événement politique phare en date fut la désaffiliation en novembre du président Jair Bolsonaro du parti social libéral (PSL) pour créer l’"Alliance pour le Brésil, après de longs épisodes de discordes avec le chef du parti, Luciano Bivar et ses partisans.
A moins d’un an des élections locales, la décision du président de quitter le PSL avec lequel il a été porté au pouvoir avait fait suite à une discorde profonde entre deux courants au sein du parti, autour notamment de la gestion des ressources financières.
Les discordes au sein du parti, en plus d’autres problématiques, ont poussé le président à annuler sa décision de nommer son fils, le député fédéral Eduardo Bolsonaro, au poste d’ambassadeur à Washington, n’étant pas assuré que cette décision sera approuvée au Congrès. Il a fini par nommer Nestor Foster à ce poste considéré comme le plus prestigieux au niveau diplomatique au Brésil.
La scène politique a également été marquée par la libération de l'ancien président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva, qui était incarcéré pour corruption, une libération qui a donné une nouvelle dimension à la polarisation Gauche-droite, sur fond d’une situation politique en Amérique du Sud des plus volatiles.
Lula a bénéficié de l'annulation par le Tribunal suprême fédéral (TSF) de l’exécution de la peine d’emprisonnement avant épuisement de tous les recours, au nombre de quatre.
L’année qui s’écoule a été aussi une période charnière sur le plan législatif qui a vu l’adoption de la tant attendue réforme des retraites, une des promesses phares du gouvernement Bolsonaro qui en tirerait des économies estimées à près de 217,5 milliards de dollars sur dix ans.
Une bonne nouvelle pour le Brésil qui vivait un véritable ralentissement de la croissance depuis plus d’un an, malgré de légers signes de reprises suite à la tournée du président qui l’a conduit notamment en Chine et au Golfe, ainsi que la méga vente aux enchères de droits d’exploitation pétrolière au large brésilien.
Les compagnies publique brésilienne Petrobras et chinoises Cnodc et Cnooc se sont taillées la part du lion de cette cession, un résultat vu par des observateurs comme un signe de rapprochement entre la Chine et le Brésil, ce dernier étant pourtant un important allié des Etats-Unis.
D’ailleurs, de l’avis de certains médias, les Etats-Unis, en surtaxant récemment l’acier et l’aluminium de son deuxième fournisseur auraient voulu manifester son mécontentement à l’égard de ce rapprochement. Donald Trump a même laissé entendre que le Brésil et l’Argentine dévaluaient délibérément leurs monnaies pour favoriser leurs exportations.
Lequel rapprochement fera encore une fois parler de lui à l’occasion de la tenue à Brasília du 11ème sommet des BRICS, qui comprend également la Russie, l’Inde et l’Afrique du Sud.
Lors de ce sommet, placé sous le thème "BRICS: croissance économique pour un avenir novateur", les pays membres ont notamment réitéré "le besoin urgent de renforcer et de réformer le système multilatéral, y compris l'ONU, l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le Fonds monétaire international (FMI) et d'autres organisations internationales.
Les BRICS ont, d’autre part, exprimé leur attachement à la mise en œuvre de l'Accord de Paris adopté conformément aux principes de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (CCNUCC).
Cette position a été marquante, car elle est intervenue à quelques semaines de la tenue de la COP25, initialement prévue au Brésil, mais annulée en décembre 2018 par Bolsonaro qui allait se retrouver au centre d’une crise diplomatique avec une partie de la communauté internationale, sur fond de la question amazonienne.
La plus grande forêt tropicale du monde considérée comme le poumon de la planète, a connu des feux de forêts sans précèdent qui ont amené des pays comme la France à épingler la politique brésilienne de gestion de cette crise. Le président brésilien y a vu lui une ingérence et une atteinte à la souveraineté du pays sud-américain.
Mais pour la première économie sud-américaine, le défi environnemental ne s’est pas arrêté là, car une nouvelle problématique environnementale mystérieuse venait à nouveau défier le pays.
Neuf États du nord-est plus l’Etat de Rio De Janeiro, ont vu l’apparition, depuis aout, de galettes de pétrole, de source toujours inconnue, sur plus 150 plages paradisiaques du Brésil, une pollution qui a causé la mort de centaines d’animaux marins et pris des proportions régionales et internationales.
Après avoir conclu à ce que les hydrocarbures "portent l’ADN" du pétrole vénézuélien, des enquêtes avaient par la suite pointé du doigt début novembre un cargo battant pavillon grec nommé Bouboulina, et des perquisitions ont même été menées au sein de la société à laquelle appartient ce navire, mais aucune preuve tangible n’a été apportée et l'armateur continue de rejeter toute responsabilité.
D’autre part, la question vénézuélienne a continué de jouir d’une perception prioritaire pour le gouvernement Bolsonaro. Quasiment absent dans l’agenda des BRRICS, le Venezuela a été au centre de la réunion du groupe de Lima, tenue également en novembre à Brasilia.
La rencontre, organisée sur fond de rapport médiatique évoquant la possibilité de sortie de l’Argentine du nouveau président, Alberto Fernández, a réaffirmé son soutien au président par intérim, Juan Guaidó et à l'Assemblée nationale, en tant que représentants légitimes et élus démocratiquement du peuple vénézuélien, condamnant les manœuvres du régime Maduro visant à saper le dialogue.
Sur un autre registre, celui du sport, le football brésilien a confirmé sa bonne santé ces dernières années. La sélection nationale a été au rendez-vous et a remporté la Copa America, dont la finale, organisée au mythique stade du Maracana de Rio de Janeiro, a vu la nouvelle vedette brésilienne Gabriel Jesus briller de mille feux lors de la victoire 3-1 contre le Pérou.
Un autre Gabriel, Gabigol, s’est fait aussi attirer les projecteurs cette année après avoir conduit le plus célèbre club brésilien, Flamengo (40 millions de supporters), au titre de champion de la Copa Libertadores, la coupe des clubs champions d’Amérique du Sud.
Pays à grande tradition footballistique, le Brésil a également abrité la coupe du monde des moins de 17 ans. Là encore la seleçao a prouvé sa suprématie en allant remporter le quatrième sacre de son histoire aux dépens du Mexique (2-1).
Le Brésil a également brillé par sa culture en 2019, avec notamment l’organisation de deux événements qui font sa renommée. Le premier est le carnaval de Rio de Janeiro qui a généré un chiffre d’affaires de 3,78 milliards de réais (983 millions de dollars), selon la Mairie de la ville.
L’autre événement majeur est le méga festival Rock in Rio, organisé sept jours durant en septembre avec pas moins de 700.000 spectateurs drainés.
Ainsi, le Brésil, le pays le plus peuplé et le plus gigantesque du continent sud-américain, plie une page 2019 remplie d’évènements politiques à rebondissements et de défis sans précédents pour se tourner vers une nouvelle, qui augure d’un décor politique encore plus imprévisible et d’une reprise économique pressante dans une région mouvementée et contagieuse.