Les restrictions de voyage à cause de la fermeture des frontières aux quatre coins du monde pour endiguer la propagation du nouveau coronavirus continuent de peser lourdement sur l'industrie du voyage. Les déplacements en avion ont chuté de 70 % dans le monde sur la base des données collectées par l'Association internationale du transport aérien (IATA) au début du deuxième trimestre 2020, qui avance un chiffre de -90% pour l'Europe.
Les experts de cette organisation, qui rassemble 290 compagnies aériennes représentant 82% du trafic mondial, estiment à plus de 250 milliards de dollars le manque à gagner pour l'aéronautique dans un scénario de sévères restrictions de voyage s'étirant sur une longue période.
Les perspectives d'emplois sur l'industrie, qui compte 65,5 millions de postes ne sont pas des plus réjouissantes. La crise du transport aérien pourrait entraîner la suppression de 11,2 millions de postes dans la région Asie-Pacifique, 5,6 millions en Europe, 2,9 millions en Amérique latine, 2 millions en Amérique du Nord, 2 millions en Afrique et 900.000 au Moyen-Orient, alerte l’organisation internationale.
Le constat est d’autant plus alarmant que la chute sans précédent de la demande concerne tous les pans du secteur, des constructeurs et leurs sous-traitants qui font face à une demande en berne, aux fournisseurs qui doivent gérer des annulations et/ou report de commandes, ainsi qu’aux aéroports désertés, devenus d’immenses parkings à avions.
Les compagnies aériennes, en première ligne face à la crise, doivent supporter des frais malgré des avions cloués au sol, notamment les loyers d'avions, les charges du personnel, les frais de maintenance des avions (estimés en moyenne à 400 millions d’euros par jour) et assurer les remboursements de leurs clients.
L'enjeu de la survie est majeur pour les transporteurs aériens qui, à défaut de liquidité, épuisent rapidement leurs réserves de trésorerie. Quelque 61 milliards de dollars pourraient disparaître des réserves de liquidités au cours du deuxième trimestre seulement, selon le pronostic de l’IATA.
Confrontée à des pertes colossales, la majorité des compagnies aériennes se trouve dans l’obligation de réduire leurs charges et d’imposer une série de mesures restrictives. Parmi elles, le gel des nouvelles embauches, la réduction des heures de travail des employés, la diminution des salaires, la réduction des dépenses administratives, et les congés sans solde.
Les annonces de cessation d’activités et de restructuration des flottes fusent de partout. Le géant allemand Lufthansa a décidé de fermer sa filiale Germanwings et se séparer de 40 avions de sa flotte. Le groupe Air France-KLM a annoncé la réduction d'environ 80% de son offre de vols et le licenciement de 3.000 employés. British Airways a averti son personnel de la suppression de nombreux postes, et sa compatriote Flyb a déjà mis la clé sous la porte.
Le Maroc n’est pas des moindres. Les perturbations associées au coronavirus pourraient engendrer des pertes importantes d'emplois dans le pays en 2020, d’après les prévisions de l’Association du transport aérien international.
La perte potentielle de revenus est estimée à 1,3 milliard de dollars cette année pour le Maroc, faisant de lui le 6e pays le plus impacté de la région Afrique/Moyen-Orient. Au niveau de l’Afrique, le manque à gagner se situerait à 4 milliards de dollars, estime l’IATA.
Par ces temps si troublés, les organisations professionnelles dédiées au secteur appellent à la clémence et implorent les Etats pour venir à la rescousse, incitant les gouvernements à tenir compte de l’importance vitale de l’industrie du transport aérien durant crise sanitaire.
C’est dans ce sens que l’IATA revendique aux Etats de mettre en place dans l’urgence des mesures pour l’accompagnement financier direct au secteur, à travers des prêts et des garanties de prêts, un allègement des impôts et une réduction des charges, ainsi que le soutien au marché des obligations des sociétés par le gouvernement ou les banques centrales.
La volonté des Etats de garantir des aides publiques se présente comme ultime issue pour assurer la viabilité et la relance post-pandémie du secteur, qui semblait pourtant démarrer la nouvelle décennie sous de meilleurs auspices, les signes d’apaisement de la guerre commerciale sino-américaine promettait une demande bien plus forte en 2020.