Au pays aztèque, plus que nulle part ailleurs, l'épidémie de la violence, toujours sans remède, ne recul pas face à la pandémie de coronavirus qui met des puissances mondiales à genoux. En mars dernier, un record de 2.585 homicides a été enregistré.
Au total de 7.313 meurtres ont été déplorés au cours des trois premiers mois de l'année, dont 2.858 commis en février, selon les données du Secrétariat exécutif du Système national de sécurité publique.
Le département fédéral observe qu'en mars, pourtant mois de la mise en place de l'état d'urgence sanitaire pour freiner l’expansion du Covid-19, les autorités ont enregistré 181 meurtres de plus que la même période de l'année précédente.
L'impact socio-économique de la pandémie risque de frapper le Mexique non seulement en terme de récession et de pertes d'emplois, mais aussi au niveau de la recrudescence de la criminalité, même si la violence dans ce pays est structurelle bien plus que conjoncturelle, explique, dans une déclaration à la MAP, le professeur des Sciences politiques à l'Université des Amériques de Puebla (UDLAP), Mohamed Badine El Yattioui.
L'année 2020 pourrait dépasser le record de 2019 et ses 35.588 meurtres, estime le journal "Reforma", notant que la plupart de ces homicides sont attribués à des gangs criminels en affrontement sanglant pour monopoliser leur territoire.
"Le chômage augmentera de façon exponentielle car les entreprises vont réduire leurs effectifs, il y aura des ajustements", prévoit Enrique Rodriguez, avocat et consultant politique.
"La tension économique à laquelle nous serons alors confrontés entraînera irrémédiablement une augmentation de la criminalité, davantage de vols, d'homicides. C'est malheureusement un phénomène que nous connaissons bien ici", met-il en garde.
Et c'est en partie, parce que durant cette période mondiale de confinement, les violences conjugales et familiales augmentent. Ainsi, le ministère de l'Intérieur a fait état d’une hausse de la violence contre les femmes de 30 à 100%.
De même, et alors que dans plusieurs pays de la planète la population se met aux fenêtres pour ovationner les professionnels de la santé aux prises avec le Covid-19, les agressions à l'encontre des soignants sont en hausse au Mexique. Une infirmière a été ainsi battue à mort lorsqu'elle est allée prendre un café près de l'hôpital où elle travaillait, dans l'État de San Luis Potosi (centre).
L'Institut mexicain de sécurité sociale, principale institution de santé publique du pays, a fermement condamné ces violences. "Elles n'ont aucun sens, aucune justification. C'est proprement scandaleux. Ne laissons pas la peur nous aveugler", s'est indignée la directrice de cet organisme, Zoé Robledo.
Cette hausse de la courbe de la violence tombe au plus mal pour le président Andrés Manuel Lopez Obrador, qui n’a eu de cesse de répéter ces derniers jours s’attendre à une baisse considérable des crimes. Dans les faits, ce n'est pas le cas.
Pour le professeur El Yatioui, le gouvernement actuel ne semble pas avoir mis en place une stratégie claire pour lutter contre ces différents facteurs alors que le président avait avancé la proposition d'une amnistie aux narcotrafiquants, qui a été considérée, par ses détracteurs, comme une promotion de l'impunité. Une stratégie globale est nécessaire pour réformer les polices locales (municipales et des États) afin d'avoir des agents mieux formés et mieux payés, a-t-il suggéré.
Le pays Aztèque qui compte près de 130 millions d'habitants, à la violence endémique, a vu le problème s'aggraver à partir de 2006, avec le lancement de la guerre contre le trafic de drogue.
Depuis, près de 275.000 personnes ont été assassinées, selon les chiffres du Secrétariat exécutif du Système national de la sécurité publique.