"Peu de grandes batailles ont précédé la signature du traité de Fès en 1912", écrit Adam Barbe. Et pour cause, "c'est l'endettement insoutenable qui a précipité l'instauration du protectorat français au Maroc".
S'accompagnant de graphiques et de tableaux, ce livre de 220 pages vient justement mettre la lumière sur "les mécanismes économiques et diplomatiques à l'origine de cet étranglement financier", tout en expliquant comment la politique impériale de la dette, "emblématique de l'expansion coloniale européenne au XIXème siècle", met en perspective "des événements structurants des années 2010, à l'instar des crises de la dette souveraine en Europe et de la politique africaine de la Chine".
Mais c'est entre 1856 à 1956, relève l'auteur, que se noue "une histoire économique, politique et diplomatique dont la dette est le fil rouge, actrice discrète mais non moins essentielle des bouleversements à l'origine du Maroc moderne".
Le livre d'Adam Barbe, révèle Thomas Piketty, économiste français et directeur d'études à l'École des hautes études en sciences sociales (EHESS), dans une préface intitulée "La colonisation par la dette", décortique avec "précision et justesse" la mécanique des "traités inégaux" qui permit aux puissances coloniales "de prendre le contrôle de nombreux pays et actifs étrangers", montrant à travers le cas du Maroc "le fonctionnement de cette logique".
Publié avec le concours du ministère de la Culture, cet ouvrage s'étend sur cinq chapitres s'intéressant, entre autres, à la question de l'impérialisme économique et le Maroc au XIXème siècle, au Maroc face à l'Europe de la période allant de 1856 à 1900, à la dette au protectorat de 1900 à 1912, aux institutions régaliennes nées de l'endettement marocain, à l'endettement du Maroc colonial et la Banque de Paris et des Pays-Bas au Maroc.
Normalien, Adam Barbe est diplômé de la Paris School of Economics et de l'Inalco. Il est également titulaire de trois licences, en économie, en sociologie et en histoire. Membre du comité éditorial de "Regards croisés sur l'économie", son mémoire de master est consacré à la dette publique marocaine de 1860 à 1956.