Compte tenu de la réalité des moyens actuels du continent, qui sont "rudimentaires" avec des infrastructures sanitaires presque "inexistantes", une avalanche d'alertes se sont abattues, concernant une crise sanitaire future due au covid-19, a expliqué M. Saleh Annadif lors de son intervention à l'occasion de la conférence virtuelle "APSACO TALKS" organisée par le Policy Center for the New South (PCNS).
Néanmoins, a-t-il poursuivi, la réalité fut différente. "Prenons le cas du Mali, 3.000 personnes ont été atteintes par ce virus, depuis mars, avec 130 décès et un taux de guérison avoisinant les 80%, ce qui est une bonne performance d’après les données de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)".
M. Saleh Annadif, également ancien ministre des Affaires étrangères du Tchad, a souligné que la crise sanitaire a eu impact important sur les populations vulnérables, qui "ont été lésées" par les différentes mesures adoptées pour endiguer la pandémie du coronavirus, dans un contexte marqué aussi par la précarisation du secteur informel.
Sur la question de l'index global de paix, le directeur du département Europe et MENA à l'Institut pour l'économie et la paix (IEP), Serge Stroobants a fait savoir que l'amélioration du niveau de paix dans certains pays est le résultat de la diminution notamment de l'impact du terrorisme et du nombre d’homicides.
Pour M. Stroobants, l'indice de paix a connu une détérioration causée par le nombre de réfugiés et de personnes déplacées, dont 60% sont pour des causes naturelles et 40% des conflits. Il a aussi relevé qu'avec la détérioration de la paix dans certaines régions, un "gouffre se crée entre les pays".
Le directeur du département Europe et MENA à l'IEP a en outre indiqué que la violence engendre un "lourd coût économique pour les pays", qui est de 14.5 billion de dollars; "presque 11% du Produit intérieur brut (PIB) mondial", a-t-il dit.
De son côté, Rama Yade, Senior Fellow à l'Atlantic Council, un think tank américain basé à Washington D.C, a rappelé dans son intervention qu'il existe une volonté pour "africaniser" les solutions aux crises du continent, notamment celles liées au Covid-19, en réinventant le multilatéralisme.
"L'Africanisation" est le nouveau défi pour répondre à la crise universelle du multilatéralisme, a-t-elle rétorqué.
Pour Abdelhak Bassou, Senior Fellow au Policy Center for the New South, la stabilisation des pays africains en ces temps de pandémie dépend de la résolution complète des problèmes existants, à savoir la corruption et la distribution des richesses africaines.
Pour sa part, Rachid El Houdaigui, également Senior Fellow au PCNS, a souligné que la crise du covid-19 "peut servir de déclic pour une mutation durable du contexte normatif sécuritaire africain vers plus de sécurité humaine, tenant compte des spécificités locales, régionales, nationales et continentales".
Compte tenu du contexte actuel, M. El Houdaigui a formulé la nécessité de "faire sortir de leur confort institutionnel et symbolique les plans standardisés de la lutte contre la covid-19 pour les mettre à l’épreuve des réalités africaines".
"L’exercice est difficile car il s’agira de revenir sur une problématique structurelle et objective, celle du différentiel existant entre la réalité matérielle de notre continent et sa capacité à reformuler ses priorités, son agenda et ses paradigmes sécuritaires", a-t-il dit.
Organisée du 23 au 25 septembre, l'APSACO Talks a invité des experts de haut niveau à s’exprimer lors de webinaires sur les thèmes du "Secteur de la sécurité en Afrique pendant et après la crise Covid-19" et de la "Privatisation de la violence en Afrique, via les groupes armés non étatiques et la sécurité privée", entre autres.