De nombreux économistes, sociologues et politologues s'accordent à dire que faire face à la crise sanitaire actuelle et à ses répercussions nécessite la prise en considération des conditions initiales d'avant la crise, qu'ils considèrent comme la clé pour comprendre la nature et les perspectives des mesures à prendre.
Il convient, en fait, de noter que ce mode d'enseignement n'est pas le corollaire de la crise sanitaire actuelle. Il a été, pendant longtemps, une revendication pressante des différents acteurs du secteur, surtout qu'il a été inclus dans la vision stratégique de la réforme du système éducatif 2015-2030 élaborée par le Conseil supérieur de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique.
Cette vision a souligné la nécessité du "développement et (de) la promotion de l’apprentissage à distance comme complément aux cours en présentiel".
Le nouveau concept d'enseignement a été associé, dans la Charte nationale d'éducation et de formation et dans la Vision stratégique de la réforme, au défi de la fracture numérique, en stipulant des dispositions portant sur l'adoption de la technologie moderne dans le processus d'enseignement et d'apprentissage.
Cependant, les législations relatives à l'éducation n'abordent pas les éventuelles difficultés nées de la crise sanitaire, ce qui aboutit à un état de confusion qui n'a pas épargné les systèmes éducatifs du monde entier. Cela met en avant la problématique de l'amélioration de la qualité en vue d'éviter d'éventuels chocs futurs.
A cet égard, Lahcen Tafraout, professeur à l’École normale supérieure de Marrakech, estime que l'école marocaine parie sur la généralisation d'un bon enseignement en général et d'un bon enseignement à distance en particulier, soulignant que la qualité exigée ne sera atteinte qu'à travers un concept nouveau de l'école avec une approche éducative active qui va au-delà du transfert négatif et individuel vers l'auto-apprentissage et la capacité de dialoguer et de participer à l'excellence collective.
Atteindre cette qualité passe par un réexamen de l'approche pédagogique et des méthodes adoptées à l'école, afin de transcender la logique pédagogique basée sur l'enseignant passif et à sens unique en allant vers un enseignement actif axé sur l'interaction avec les apprenants, le développement de leurs capacités personnelles et la création d'opportunités de créativité et d'innovation, a ajouté M. Tafraout dans une déclaration à la MAP.
En ce qui concerne les approches pédagogiques qui garantissent l'amélioration de la qualité de l'enseignement à distance, notamment les compétences, la pensée critique, et les valeurs dans l'école marocaine, l'universitaire a souligné la nécessité de la numérisation, rappelant que le Maroc a adopté une panoplie de mécanismes pour intégrer les technologies de l'information et de la communication aux différents niveaux du système d'éducation et de formation.
M. Tafraout, également professeur visiteur à l'université Cadi Ayyad, a observé que les documents pédagogiques et législatifs encadrant le système éducatif au Maroc prévoient tous l'adoption des nouvelles technologiques comme supports éducatifs, rappelant à cet égard l'élargissement du programme d'urgence de distribution des ordinateurs, dans le cadre du programme "GENIE".
S'arrêtant sur les possibilités d'améliorer l'enseignement à distance, l'universitaire a souligné que le processus d'enseignement à distance ne doit aucunement négliger la dimension humaine de l'enseignant et de l'apprenant, soulignant également la nécessité de fournir l'équipement nécessaire à la bonne marche de l'enseignement à distance.
Plusieurs apprenants, a-t-il relevé, ne disposent pas des moyens numériques ou ne sont pas en mesure d'accéder aux sites électroniques, en particulier dans les zones rurales éloignées et les zones en situation de précarité. Selon l'universitaire, l'équité et l'égalité des chances requièrent la poursuite et la généralisation des chantiers d'amélioration des ressources numériques, condition sine qua non pour améliorer la qualité de l'enseignement à distance.
M. Tafraout a, en outre, insisté sur l'investissement dans la formation et la formation continue des enseignants, relevant que la formation et la qualification devraient inclure la connaissance des nouvelles technologies de l'information, de la communication et du numérique.
Il a appelé à éviter de limiter le mode d'enseignement à distance à la connaissance, car il y a des compétences qui sont requises pour chaque mode d'enseignement, représentées dans les valeurs, les orientations psychologiques, la communication et le bon sens pour ne pas se retrouver avec des têtes pleines d'idées et d'informations mais incapables de les exploiter.
Le professeur universitaires souligne aussi l'importance d'adopter de nouvelles approches d'évaluation à distance compatibles avec les évaluations au niveau international tels que "Timss" et "Pisa", qui reposent sur des normes communes de qualité à l'échelle mondiale. Cela permettrait, a-t-il assuré, à l'enseignement à distance de se hisser d'un simple moyen de préparer l'étudiant pour l'examen à un moyen de surmonter les erreurs pédagogiques et un moyen de soutien et de traitement.
M. Tafraout a noté que le concept d'"enseignement mixte" ou d'"enseignement hybride" s'est imposé comme une troisième voie qui intègre l'enseignement à distance et le système d'enseignement par groupes, qui fait débat chez les acteurs et les familles, vu le temps libre dont disposent les apprenants.
Cette troisième option consiste à adopter parallèlement l'enseignement à distance et l'enseignement présentiel traditionnel, ce qui réduira l'écart horaire dû au système d'enseignement par groupes.