Ce phénomène a pris des tournures alarmantes en raison du terrible développement des moyens numériques à travers le monde, vu que les enfants sont devenus la catégorie la plus visée par des usagers malfaisants sur les réseaux sociaux.
Le contexte particulier qui prévaut au Maroc, à l'instar du reste du monde, en liaison avec la crise sanitaire et ses répercussions sociales, économiques et psychique, en particulier chez les enfants, a aggravé encore plus la situation, puisque plusieurs indicateurs font état dune hausse notable des cas de violence durant cette période de pandémie, où les pressions économiques ont atteint des seuils intenables pour beaucoup d'individus.
Cette situation a poussé l'UNICEF à publier un communiqué après l'affaire d'Adnane à Tanger, soulignant que les mesures préventives proactives sont plus efficaces à long terme, en appelant à bannir toutes formes de violence contre les enfants et à accélérer la mise en œuvre des dispositions législatives relatives à la protection des enfants soumises à la Chambre des représentants depuis 2015.
Nombre d'experts, juristes et institutionnels avaient souligné, lors d'un récent débat sur cette thématique, la difficulté de détecter des cas de violence physique, vu que leur majeure partie s'est produite derrière les murs (maisons) et des tabous qui entourent le phénomène, alors que dans le monde cybernétique, le niveau de violence contre les enfants est un phénomène qui est en train de prendre une tournure alarmante.
Dans ce contexte, la vice-procureur du Roi au tribunal de première instance de Casablanca, Hasna Chinab, a indiqué que lors du confinement, le ministère public a constaté plusieurs cas de renvoie du foyer conjugal (mères et enfants), alors que les cas de divorce ont connu une hausse notable durant cette période, en raison de la dégradation des conditions de vie, ayant donné lieu à des cas de violence dont les enfants étaient les principales victimes.
Il s'avère désormais nécessaire que le ministère de la justice crée des unités de suivi psychique des enfants en vue d'accompagner ceux qui subissent des violences et des agressions, a-t-elle relevé, appelant l'Etat à prévoir des initiatives sectorielles pour la protection des enfants des dangers numériques et de toutes agressions, à travers une meilleure coordination entre les différents intervenants.
Dans le même ordre d'idées, le spécialiste en médecine légale, Abdelilah Lakbiri, a fait savoir qu'à l'intérieur des services d'urgence, l'on constate des traces de violence sur plusieurs enfants qui s'y rendent, notant que la vie dans un espace fermé a encore amplifié les crises psychiques et donc le recours à la violence.
Face au grand manque du nombre de médecins légistes au Maroc, il y a un grand besoin de former des professionnels de la santé au sein des services d'urgence pour détecter les éventuels cas de violence, tout en les dotant des mécanismes nécessaires de diagnostic.
Pour ce qui est de la violence et l'exploitation numérique, le spécialiste en psychologie sociale, Mohcine Ben Zakour, a considéré que les mesures de l'état d'urgence sanitaire ont imposé une sorte d'isolement aux enfants qui se sont tournés, pour y remédier, aux ordinateurs, téléphones portables et tablettes, à leur risque et péril.
Pour une meilleure protection des enfants contre ces menaces, les parents sont appelés à assumer leur rôle et à procéder à leur contrôle, de manière régulière, a-t-il recommandé.
Le Maroc a franchi d'importantes étapes pour la mise en œuvre d'une politique publique intégrée pour la protection de l'enfance 2015-2025, et du programme national exécutif 2015-2020 dont la deuxième partie est en cours d'élaboration.
Ce programme vise la mise en place d'un cadre stratégique multifonctionnel comprenant un arsenal efficient et global, renfermant des mesures, programmes et activités visant à prévenir toutes formes de violence, d'exploitation ou de négligence.
Parmi les initiatives nationales visant à offrir une bonne protection aux enfants contre les violences, figure l'initiative de l'observatoire national des droits de l'enfant de lancer une plateforme numérique pour informer des cas de violence, d'exploitation et de négligence des enfants, durant cette conjoncture exceptionnelle marquée par la pandémie du Covid-19.
Cette plateforme WWW.2511.ma est destinée à contribuer à lutter contre la violence à l'égard des enfants, en permettant à toute personne de rendre compte de ces cas, à travers des moyens techniques de communication à distance.
En dépit des avancées réalisées par le Maroc dans le domaine juridique, législatif, et institutionnel, le phénomène de la violence contre les enfants ne fait que s'amplifier, ce qui nécessite l'élaboration d'une vision réaliste partant des vraies raisons à l'origine de ce phénomène, en étendant le cercle de consultations à l'ensemble des différents intervenants concernés.
Un rapport de l'UNICEF publié en 2017 avait indiqué que près de 90 pc des enfants marocains âgés entre 2 et 4 ans ont fait l'objet de violence de la part de leurs tuteurs, et que 25 pc d'entre eux ont subi des violences physiques, alors que le Royaume occupe le 10ème rang mondial pour ce qui est du nombre le plus élevé des cas de violence à l'égard des enfants.