Etabli au Mexique depuis plusieurs années, l'universitaire marocain croit savoir que le Royaume a tout les moyens pour développer vis-à-vis du sous-continent une nouvelle vision géopolitique fondée sur le rôle stratégique de l'océan atlantique et l'impératif de promouvoir les relations de coopération entre les deux rives de l'Atlantique.
1. Comment évaluez-vous la présence du Maroc, et de l'université marocaine en particulier, dans cette région ?
Malheureusement notre pays reste peu connu des Latinos-Américains et notamment son monde académique. Quelques partenariats existent entre universités mais ils sont trop rares pour changer la donne. Par ailleurs, précisons que la présence d'universitaires de cette région au sein du Royaume est quasi-inexistante.
2. Quelles sont les perspectives de la Coopération académique entre les universités marocaines et latino-américaines ?
Les perspectives à court terme semblent limitées malheureusement, mais elles ne sont pas inexistantes. Nous avons fondé un institut à Laayoune consacré à la coopération Sud-Sud. En tant que vice-président du conseil scientifique, j'ai pu convaincre un certain nombre d'universitaires mexicains et colombiens de nous rejoindre. Ils en sont aujourd'hui membres de plein droit et certains y exercent même des responsabilités. Il faut donc aller vers la concrétisation de partenariats dans le cadre d'une coopération Sud-Sud sur la base de projets académiques concrets.
3. Cette coopération est de nature à canaliser les échanges universitaires entre le Mexique et le Maroc et renforcer la présence marocaine dans cette région. Dans quelles mesures ?
La présence marocaine au Mexique est en partie liée aux doctorants issus du Royaume et inscrits dans des universités mexicaines. Espérons qu'ils puissent trouver des postes d'enseignants-chercheurs dans ce pays ou plus largement dans la région afin de mieux faire connaître le Maroc. L'autre élément nécessaire est le développement de publications académiques communes. La question linguistique se posera mais il faut trouver un modus vivendi avec la langue anglaise si nécessaire.
4. Comment le Royaume peut-il développer vis-à-vis du sous-continent une nouvelle vision géopolitique ?
Le XXIe siècle voit un basculement géopolitique sans précédent de l'Atlantique vers le Pacifique du fait, notamment, de la compétition incessante entre Américains et Chinois. Malgré tout, l'océan Atlantique gardera une place non négligeable sur le plan géoéconomique. Le Maroc a un rôle à jouer dans la promotion de cette idée via la coopération Sud-Sud. Un pays comme le Brésil l'a compris depuis bientôt vingt ans et le passage au pouvoir de Lula. Au Maroc de développer ce type de relation bilatérale et de s'en servir comme un levier pour une coopération plus large avec d'autres pays de cette région sur le plan commercial principalement. Le port Tanger-Med devrait servir de plateforme avec cette région tout comme celui de Casablanca et prochainement celui de Dakhla. Le Maroc bénéficie d'une façade Atlantique importante et se doit de la "rentabiliser" dans le cadre de sa stratégie économique et commerciale.
5. Comment les deux parties peuvent parvenir à partager les expériences afin de mettre la science au cœur de la coopération internationale et au service des politiques publiques ?
Pour faire prévaloir le rôle primordial des acteurs culturels qui se doivent de promouvoir la diversité culturelle à travers la mise en œuvre d'outils permettant le rapprochement des peuples et l'instauration du dialogue entre les cultures, il faut un plan multi-niveaux. Le rôle des ambassades marocaines dans ces pays doit être proactif. Ensuite, les milieux culturels et scientifiques marocains doivent être au courant des possibilités offertes par les pays d'Amérique latine. Enfin, la coordination interministérielle doit être renforcée. Sans oublier que l'objectif final doit être la mise en oeuvre concrète de projets de coopération basés sur l'échange et le partage du savoir.