Les clients des cafés appartenant à différentes couches sociales s'y rendent en grand nombre, en vue de passer des moments agréables en famille et entre amis, lutter contre la routine, se relaxer et se débarrasser du stress de la vie quotidienne.
Il s'agit en fait d'un espace public, dont le niveau est déterminé en fonction de la qualité des clients et du service offert et qui varie généralement entre cafés populaires et huppés.
Pour certains, le fait de se rendre au café vise à s'éloigner des soucis de la vie quotidienne, alors que pour d'autres, il constitue un lieu de rencontre entre amis pour échanger sur les expériences vécues.
Toutefois, dans son image moderne et contrairement au passé, le café n'est plus cet espace public qui aide à passer le temps et fuir le rythme accéléré de la vie, surtout après que différentes appellations sont attribuées à cet espace devenu presque comme un forum culturel, artistique et parfois même politique et syndical.
Naguère, le café s'est imposé avec force dans l'organisation sociale populaire, et ses équipements étaient simplement sous forme de chaises et de tables en bois, et même la préparation du café et du thé se faisait de manière traditionnelle, les habitants du quartier s'y rendent pour s'offrir une partie de jeu de cartes et passer de longues heures dans l'espoir d'oublier les tracasseries et le fardeau de la vie quotidienne.
Pour le chercheur en anthropologie urbaine, Ahmed Chitachni, le café est un phénomène ancien, rappelant dans ce sens que la préparation du thé et du café obéissait auparavant à un rituel bien précis et se faisait sur le feu de charbon de bois, en utilisant des ustensiles en cuivre qui sont toujours utilisés dans certaines villes anciennes.
D'autres cafés n'assuraient qu'un service de préparation car le client y apportait son thé ou café et même le sucre, selon les préférences et le budget de chacun. La qualité du produit était aussi relative à la bourse du client.
M. Chitachni a également indiqué que dans le passé, les clients de cafés pratiquaient divers métiers traditionnels et s'y rendent pour rencontrer leurs amis, pratiquer leurs jeux favoris aux rythmes de la musique marocaine et écouter les bulletins d'information, ou même chanter en chœur eux les poèmes du Malhoun et la musique andalouse.
Aujourd'hui, la réalité a beaucoup changé, les cafés ne correspondant plus à ce stéréotype, surtout après qu'ils ont été décuplés dans les villes et même dans les zones rurales, portant des noms choisis avec beaucoup de soin et fonctionnant telle une entreprise moderne employant un grand nombre de personne, dotée d'équipements haut de gamme et offrant des prestations diverses et variées, comme des jeux, l’Internet et des bouquins pour les funs de la lecture.
Aussi, les cafés à l'heure actuelle sont devenus comme des lieux "hybrides", mêlant espaces public et privé, en plus de la diversité de leurs formes et de leurs rôles, fait observer M. Chitachni, énumérant "le café populaire" généralement situé à proximité des quartiers périphériques, "le café du centre-ville", les cafétérias modernes et les cafés des franchises internationales, désormais investis aussi bien par les hommes que les femmes, dans une forme de changement de mœurs en phase avec les transformations sociales.
Tous les cafés et particulièrement modernes comptent parmi leur clientèle des hommes et des femmes appartenant à différentes tranches d'âge qui s'y rendent notamment pour suivre ensemble les matchs de football, surtout les rencontres du onze national. Et il est devenu tout à fait normal d'y croiser de jeunes femmes qui y travaillent comme serveuses pour gagner leur vie.
L'acte et le timing d'aller au café n'ont plus la même signification qu'autrefois car cela fait, aujourd'hui, partie des faits et gestes quotidiens de tout un chacun, comme faire les courses, se rendre au travail, pratiquer du sport, surfer sur le Net ou feuilleter un ouvrage. Le rendez-vous avec le café est différent de ce qu'il était auparavant, d'autant plus que cet espace public est devenu un élément essentiel de la vie de tous les jours et de la structure sociale moderne.
Pour ce chercheur, le café peut désormais être considéré, en plus de son rôle historique de divertissement, comme un espace d'interaction et de communication sociale entre les usagers, mais également un lieu pour exercer une activité économique à travers la conclusion de transactions commerciales et la discussion d'affaires.
M. Chitachni attire, enfin, l'attention sur le rôle central qu'occupe au sein cette structure le "serveur", qui en est le personnage clé, au vu de sa connaissance précise des clients et de leurs besoins particuliers, comme dans le cas de certains étudiants qui transforment les lieux en une sorte de bibliothèque publique, en l'absence d'installations culturelles appropriées dans les quartiers et de l'exiguïté du foyer familial.