Après des années de non-dits et de menaces implicites, Barcenas, condamné à 29 ans de prison en 2018 dans la fameuse affaire qui a dévoilé l’existence d’une "caisse B" du PP, "une structure financière et comptable parallèle à la comptabilité officielle au moins depuis 1989", a décidé de sortir de son silence et de collaborer avec la justice.
Ouvert lundi, ce nouveau procès, qui va durer au moins quatre mois risque de bousculer la principale force de l’opposition accusée d’avoir mis en place des circuits de corruption systématique pour renflouer ses caisses sur la base de commissions illégales versées par des entreprises en échange de l'attribution de contrats publics.
Cette affaire en cascade est susceptible de compromettre non seulement l’actuelle direction du PP, conduite par Pablo Casado, qui œuvre pour améliorer l’image du parti après des années sombres, mais aussi les anciens leaders des populaires, notamment Mariano Rajoy, ancien président de cette formation politique entre 2004 et 2018.
Pour corroborer ou non l’existence d’un « modus operandi » illégal au sein du PP permettant des transactions en liquide pendant plus de 20 ans, les juges devront analyser sous la loupe « les papiers de Barcenas », des documents manuscrits de l’ex-trésorier du PP comprenant des chiffres, des noms et des initiales d’anciens dirigeants ou d’entreprises soupçonnés d’être impliqués dans le financement en noir de projets du parti ou d’avoir bénéficié d’enveloppes de la fameuse « caisse B ».
Dans une tentative de confirmer ses intentions d’aller le plus loin possible dans ce procès, l’avocat de l'ancien trésorier, Gustavo Galán, s'est joint à l'initiative de faire comparaître Mariano Rajoy, ancien président du gouvernement et ancien chef du parti conservateur, comme témoin lors de l'audition publique. En plus, la défense de Barcenas est allée plus loin en demandant au tribunal une confrontation entre son client et l'ancien chef de l'exécutif espagnol.
Cette requête de l’avocat de Barcenas, qui a été rejetée en 2018 par l’Audience nationale, n'est pas anodine. L’ancien trésorier du PP pendant 20 ans a récemment déposé une demande auprès du parquet anticorruption où il a avoué pour la première fois que le gouvernement de José María Aznar a attribué des contrats publics en échange de dons au parti, une accusation qui fait toujours l'objet d'une enquête par l'Audience nationale.
Dans ce document envoyé au ministère public, l’ex-trésorier accuse également Rajoy d’avoir reçu des enveloppes provenant de la « caisse B » et d’avoir détruit les documents sur la comptabilité parallèle, dont Barcenas gardait une copie.
En attendant la décision du tribunal sur la comparution ou non de Rajoy comme témoin, l’actuelle direction du PP a réitéré que son engagement en faveur de la transparence est « très clair » et qu'elle agira contre tout responsable ou militant dont la responsabilité est avérée par la justice dans le procès relatif à la comptabilité parallèle du parti.
"Je ne permettrai aucune violation. Si le juge détermine qu'il y a une quelconque responsabilité de la part d'un militant du parti actuel, ma main ne tremblera pas. Toute personne impliquée sera suspendue ou expulsée selon les statuts du parti et je tiens à le dire très clairement", a souligné le président du PP, Pablo Casado, embarrassé par la gestion financière de ses prédécesseurs.
Tout en qualifiant Barcenas d’"un délinquant ayant fait du mensonge son style de vie", Casado, ancien responsable de communication au PP avant de devenir son président, a assuré que l’actuelle direction n’a rien à voir avec les erreurs commises au passé.
Alors que ce procès risque de prendre des dimensions considérables lors des prochains mois, la pression monte contre le PP qui semble être rattrapé à vie par sa gestion financière sombre.