Outre l'impact financier et social de ces mesures restrictives, imposées pour stopper la propagation de la Covid-19, les musiciens de haut niveau font face au problème de la baisse de performance. En effet, à l'image des sportifs de haut niveau, les musiciens et les chanteurs ont besoin de maintenir une activité régulière de leurs articulations, muscles et cordes vocales, sans quoi la reprise des spectacles après la pandémie risque d'être plus compliquée.
Dans un entretien à M24, le directeur du Conservatoire national de musique et d'art chorégraphique de Rabat, Samir Tamim revient sur les effets d'une année sabbatique sur la performance des musiciens de haut niveau et les perspectives post-covid.
- Mis à part les effets économiques qui ont touché bien des domaines, quelles sont les répercussions de l'année pandémique sur la pratique musicale au Maroc ?
Outre les répercussions financières et sociales sur les artistes, la période de confinement a eu un impact majeur sur la pratique musicale et les performances des musiciens. En effet, à l’instar des sportifs de haut niveau, toute interruption de la pratique régulière ne peut qu’impacter le niveau des musiciens professionnels.
Car la musique, le chant ou encore les arts chorégraphiques sont basés sur les mouvements des articulations et des cordes vocales qu'il faut entraîner régulièrement et avec une intensité progressive. De même, pour les mouvements et les chorégraphies des danseurs qu’il faut répéter en permanence afin de préserver les acquis et les compétences techniques.
Dès lors, les effets de cette longue interruption devraient perdurer bien après la crise sanitaire et seraient perceptibles à la reprise des manifestations culturelles et artistiques.
- Les secteurs informels étaient-ils plus impactés par la crise que les secteurs structurés ?
La pandémie du Covid-19 et les mesures restrictives qu’elle a engendrées ont eu de grandes répercussions sur les professions artistiques. Le confinement de plusieurs mois et la fermeture, depuis déjà une année, des salles de spectacles, des lieux de répétitions et des studios d'enregistrement ont fortement impacté le monde de la musique, en particulier les domaines informels.
Heureusement pour les domaines structurés, les répercussion ont été moins dramatiques. Par exemple, l'enseignement musical au niveau des conservatoire ne s'est jamais arrêté. Nous avons continué à travailler, à enseigner et à pratiquer la musique dans un respect strict des gestes barrières.
Cette continuité a permis aux musiciens appartenant aux conservatoires de maintenir leur niveau de performance, étant restés en contact quotidien avec leurs instruments et leurs compères.
Aussi, au moment où les problèmes financiers hantaient les musiciens des secteurs non structurés, les artistes exerçant au sein des conservatoires ont pu compter sur leur rémunération en tant qu'enseignants et ont, donc, eu moins de problèmes financiers.
- Quelles perspectives pour l'activité musicale au lendemain de la pandémie ?
Une fois la crise sanitaire terminée, le monde des arts, notamment celui de la musique et des arts chorégraphiques, reprendra de plus belle!
S’il y a un point positif à mettre au compteur de la pandémie, c’est qu’elle a révélé l’attachement des gens aux arts et aux spectacles. Les réseaux sociaux débordent de messages de spectateurs assoiffés de musique, qui expriment leur impatience de voir les festivals reprendre et les salles de spectacles rouvertes à nouveau.
En attendant, les musiciens essaient avec leurs moyens de bord de compenser la mise à l’arrêt de la plupart des activités artistiques, en offrant des concerts 2.0, grâce à des sites et des applications créés initialement pour des conversations vidéo, mais transformés pour l’occasion en véritables scènes réunissant plusieurs artistes.
Dans ce sens, nous avons organisé au Conservatoire national de musique et d'arts chorégraphiques des concerts que nous avons diffusé sur les réseaux sociaux, notamment un concert à l'occasion de la Journée internationale de la Femme (8 mars). Cette prestation a été regardée par près de 22.000 spectateurs en l’espace de 48H et a suscité une forte admiration auprès du public.