Quand le bras de fer entre Rabat et Madrid était arrivé à une “dangereuse impasse”, Madrid n’avait pas répondu à cette crise bilatérale de manière à trouver une solution dans un cadre restreint, souligne le politologue dans une analyse intitulée “Quand l’Espagne joue la carte de la solidarité européenne contre le Maroc”.
Les autorités espagnoles, espérant faire pression sur le Maroc, ont tenté de transformer ce bras de fer politique en un dossier de crise avec l’Europe sur fond d’angoisses migratoires, estime-t-il, faisant observer que cette volonté d’européaniser une crise bilatérale fait partie de "l’arsenal de guerre" espagnol contre le Maroc.
La tension que viennent de vivre les relations entre le Maroc et l’Espagne a mis à rude épreuve le principe de solidarité européenne conjugué aux intérêts nationaux de chacun des pays membres, relève-t-il dans cette analyse publiée sur le site Atlasinfo.
"L’Europe n’est vraiment sortie de sa réserve que lorsque le gouvernement de Pedro Sanchez a fait jouer la carte du cauchemar migratoire", renchérit le politologue, fustigeant une certaine presse espagnole excitée par la démolition de l’image du Maroc et motivée par des règlements de compte historiques aux relents xénophobes.
Pour le politologue, Madrid a joué à fond la carte de la peur migratoire pour faire condamner le Maroc et lui faire porter tous les torts de cette crise.
“Son objectif était moins de militer pour une protection européenne commune contre les réseaux de l’immigration clandestine que construire un camouflage politique et médiatique afin de cacher les faillites de sa gestion de l’affaire Brahim Ghali qui ont fait tomber les masques de sa duplicité à l’égard du Maroc”, soutient-il.
Et de poursuivre que cette crise a d’ailleurs provoqué de nombreux grincements de dents au sein même de la classe politique espagnole dont certaines voix influentes ont demandé la démission de la ministre espagnole des Affaires étrangères, Arancha Gonzalez Laya, pour cause d’incapacité politique et diplomatique et de faillite à gérer cette tension avec un pays voisin aussi important comme le Maroc.
Face à cette crise, certains pays européens étaient manifestement tiraillés entre leur solidarité organique avec l’Espagne dont ils partagent l’appartenance à l’Union européenne (UE) et leurs relations stratégiques et particulières avec le Maroc, note M. Tossa.
Pour le politologue, la vraie interpellation qui suscite le débat est la suivante : comment se fait-il que l’ensemble de l’espace européen puisse mettre dans la balance la vitalité de ses rapports avec le Maroc simplement parce qu’une partie du pouvoir espagnol, minime et agissante, activiste et militante, a jugé utile d’appuyer sur la pédale de son antagonisme avec le Maroc ?
Les agendas, les intérêts espagnols ne coïncident pas forcément avec ceux des Français, des Italiens ou des Belges. Et pourtant, au nom de la solidarité européenne, tous ces pays sont sommés de s’aligner sur la température des relations voulues par l’Espagne, ajoute-t-il.
“D’ailleurs il serait hasardeux, voire dangereux, pour ces pays européens de se laisser entraîner dans cette tourmente entre le Maroc et l’Espagne”, prévient-il.
Mais cette crise, observe M. Tossa, peut aussi aider à générer un exercice de clarification. Malgré les apparences et les multiples artifices utilisés par le gouvernement espagnol pour détourner l’attention, les pays de l’UE savent que le fond de la crise entre Rabat et Madrid n’a rien à voir avec les problématiques de l’immigration mais plutôt avec la question du Sahara.
Le Maroc voudrait que ses alliés européens s’alignent sur la position américaine pour clore définitivement cette dispute territoriale voulue par Alger. “Or, il constate non seulement une grande hésitation que rien, officiellement, ne justifie, mais aussi un dangereux double jeu de la part de certains qui ambitionnent de miser et de gagner sur tous les tableaux”, conclut-il.