Intervenant dans le cadre des Assises sénégalo-marocaines de la décentralisation, ouvertes lundi en présence d'une forte délégation Marocaine, conduite par M. Abdelouahhab El Jabri, Gouverneur chargé du Pôle Coopération et Documentation à la Direction Générale des Collectivités territoriales, M. Aziz Abarat, Cef de division à la DGCT, a indiqué que le régime de la Décentralisation a toujours constitué une composante principale des chantiers de réforme politiques et administratifs menées dans le pays, ajoutant que ledit régime est étroitement lié aux successives réformes constitutionnelles entreprises au Maroc.
Il a rappelé dans ce sens que la première Constitution du Royaume adoptée en 1962 a confirmé le choix de la décentralisation en constitutionnalisant, dans un premier temps, deux niveaux de collectivités locales : les communes urbaines et rurales et les provinces et préfectures.
La Constitution de 1992 a érigé la région au rang de collectivité locale, laquelle a été concrétisée par l'adoption en 1997 d’une loi portant organisation des régions. Et en fin, la Constitution de 2011 qui a donné naissance à la régionalisation avancée.
D’autre part, a-t-il noté, l’évolution de la décentralisation s’inscrit dans un contexte général d’évolution de l’Etat de Droit au Maroc avec la création des tribunaux administratifs en 1994, la gestion déconcentrée de l’investissement en 2002, l’adoption du nouveau code de la famille en 2003, la mise en place de l’Instance Equité et Réconciliation en 2004, et le lancement de l’Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH) en 2005.
«Certes, le processus de décentralisation est et reste la base de l'organisation administrative du Maroc, depuis les temps les plus reculés, sous forme de la représentation tribale et régionale à travers ce qui est connu sous la dénomination de communes traditionnelles et ce, jusqu'à l'avènement de l'indépendance du pays où ce processus est devenu un régime moderne comparable à celui qui prévaut dans les institutions existantes dans les Etats démocratiques», a dit M. Abarat dans sa présentation lors d'une séance plénière sur "L'état de la décentralisation: Acquis et perspectives", programmée dans le cadre de ces Assises.
En ce domaine, un important dispositif législatif a été mis en place dotant le Maroc de ces premières institutions démocratiques locales, et ce, en vertu du premier Statut Communal de 1960, a précisé l'expert marocain.
Cette loi est devenue la référence juridique fondamentale pour l'organisation du fonctionnement des 859 jeunes communes et le partage de la gestion des affaires locales entre les assemblées communales élues et les représentants de l'administration qui ont continué à veiller sur les services communaux et à exécuter les délibérations des Conseils, a indiqué l'intervenant.
Le processus de décentralisation a été poursuivi par le renforcement de ses fondements, à travers la promulgation, en 1976, d'une nouvelle Charte Communale qui a mis fin à la gestion bicéphale des communes et qui a constitué un tournant décisif dans la vie locale et nationale.
En effet, depuis cette date, la commune marocaine a commencé à prendre corps et à s'affirmer progressivement à l'instar de ses consœurs dans les nations les plus avancées, tant au plan institutionnel qu'économique et culturel, imprimant ainsi un élan sans précédent à notre décentralisation, a-t-il encore relevé.
Il a fait noter qu'outre les réformes touchant le statut des organes de la commune, leurs règles de fonctionnement et la tutelle de l'administration, la nouvelle Charte Communale adoptée en 2002 a substantiellement révisé la sphère des compétences communales, le régime des communautés urbaines et des grandes agglomérations et les pouvoirs de coopération, d'association et de partenariat des communes, aux niveaux national et international, dans le but de renforcer les capacités d'une participation réelle de ces collectivités au développement économique et social du pays.
Au cours de cette même année, la loi relative à l’organisation des préfectures et Provinces a été modifiée, a-t-il ajouté, rappelant qu’après sept ans, la Charte communale de 2002, a connu une réforme substantielle qui a touché les aspects relatifs au renforcement des dispositifs de coopération et de partenariat, la modernisation de la gestion financière des collectivités locales, l’adaptation des outils de gestion du patrimoine communal, et surtout l'amélioration du statut de l’élu en instituant la possibilité d’exercice à plein temps du mandat de président pour les fonctionnaires et agents de l’Etat et en élargissant le bénéfice du régime indemnitaire aux présidents des commissions.
Il a poursuivi que l’évolution de ce processus de décentralisation a été couronnée par la consécration de la Régionalisation Avancée (RA) qui traduit les efforts que le Maroc, sous la conduite éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu Le préserve, ne cesse de déployer en faveur de la décentralisation, base de la démocratie locale.
A cet égard, il a signalé que la RA escomptée, tel qu’il ressort des multiples discours et messages du Souverain, n’est pas un simple aménagement technique ou administratif, comme elle n’est pas seulement un ensemble de lois et de procédures administratives.
Au-delà de ça, la Régionalisation avancée constitue la traduction d’une option résolue pour la rénovation profonde et la modernisation des structures de l'Etat, et pour la consolidation du développement intégré, a-t-il insisté.
Selon lui, elle est le support d’une approche pratique en matière de gouvernance territoriale et le moyen le plus efficace de venir à bout des problèmes locaux et de satisfaire les demandes des populations qui en sont affectées. In fine, elle est considérée comme étant la pierre angulaire sur laquelle l’Administration doit s’appuyer pour rapprocher le citoyen des prestations des services et du centre de décision.
Au Maroc, la Régionalisation avancée est conçue comme une véritable politique publique à laquelle SM le Roi Mohammed VI, que Dieu l’Assiste, accorde une importance capitale, a-t-il fait savoir, relevant qu’en tant que telle, la Régionalisation avancée a été mise sur l’Agenda du Gouvernement depuis 2011, comme axe stratégique des Programmes Gouvernementaux : «La mise en place de la régionalisation avancée et la consolidation de la décentralisation et de la déconcentration».
Dans ce sillage, il a rappelé que la Constitution de 2011 a placé les Collectivités territoriales au rang de «partenaire privilégié de l’Etat».
Lors de cette rencontre, M. Abarat a donné un aperçu sur le parachèvement de l’arsenal législatif et réglementaire relatif à la mise en œuvre de la RA, l’élargissement des compétences élargies dévolues aux Collectivités territoriales, la consécration de la planification stratégique du développement, la consolidation de la démocratie participative, et l’Etat-accompagnateur au lieu de l’Etat-tuteur.
Certes, a-t-il conclu, le processus de décentralisation est une œuvre de longue haleine, ininterrompue et continue, il exige non seulement la mobilisation des hommes et des femmes autour des choix stratégiques pour assurer une vie décente des citoyens, mais également le changement de paradigmes pour affronter les défis du 3ème millénaire où la mondialisation, la rationalité, l'efficacité et la compétitivité sont de mise.
Lors de cette séance plénière, l'expert sénégalais, Birame Owens Ndiaye Spécialiste en Gouvernance, Décentralisation et Financement des collectivités territoriales, a fait lui aussi une communication sur l'Etat de la décentralisation dans son pays.
Les travaux des Assises Sénégalo-Marocaines de la Décentralisation, tenues sous le parrainage du Chef de l'Etat Macky Sall, se poursuivront jusqu'à mercredi.