1. Quelle est la particularité de la deuxième édition du FLAM?
Pour notre première édition, il était compliqué de convaincre de grands auteurs de faire le déplacement à Marrakech. J’ai eu la chance d’avoir l'écrivain de langue française, Jean-Marie Gustave Le Clézio, qui m’avait promis de venir visiter un jour les Etoiles de Jemaa El-Fna, les Etoiles de Sidi Moumen et la Fondation Ali Zaoua.
Il est venu à Marrakech où il a donné une leçon inaugurale exceptionnelle pour notre première édition qui a réuni une quarantaine d’auteurs.
La première édition était axée sur des "sujets qui fâchent " : nous avons parlé de tout ce qui nous sépare, dont l’histoire de l’esclavage, le racisme…..
Pour cette 2ème édition, nous nous sommes focalisés sur la littérature. En effet, nous avons le privilège d’avoir une leçon inaugurale avec Souleymane Bachir Diagne. C’est un miracle que ce philosophe de renom, qui enseigne à Columbia, soit parmi nous ! Nous avons la chance également d’avoir Edgar Morin pour le Grand Entretien, ainsi que d’autres auteurs, tels que Raphaël Confiant, Abdellatif Laâbi, Alain Mabanckou, ainsi que d’autres écrivains africains que nous apprécions.
2) Selon vous, quelle est la spécificité de la littérature africaine et afro-descendante?
Nous avons un imaginaire commun. Si je devais me définir en tant qu'écrivain, je dirais que je suis le fruit d’un mariage entre ma grand-mère, ma nourrice africaine et le conteur de la grande place.
Je suis un grand passionné de la littérature africaine. Evidemment, nous avons un imaginaire commun parce que nous avons un passé commun et ce que nous voulons faire aujourd’hui c’est raconter le passé, parler d’aujourd’hui et surtout penser à l’avenir. Qui mieux que les artistes et les écrivains pour penser et réfléchir à cet avenir commun du Continent ?
Par ailleurs, nous tenons à bâtir cet avenir commun : nous avons tous les moyens pour y arriver (intelligence, matières premières, richesse culturelle…)
3) Par quels moyens est-ce que ce festival participe à la promotion et à la mise en valeur de la littérature africaine et afro-descendante ?
Le festival aspire déjà à mieux faire connaître la littérature africaine et afro-descendante afin d'inciter les Marocains à lire davantage, car cela m’a profondément surpris de savoir que la moyenne annuelle de lecture des Marocains était de 2 à 3 minutes.
Animés de cette volonté d’encourager les gens à lire que nous invitons des auteurs à ce festival, afin de leur donner goût à la lecture. D’ailleurs, nous avons lancé cette année un riche programme Hors des murs. Ainsi, une brochette d’auteurs se sont rendus dans 25 établissements pour aller à la rencontre des élèves qui ont lu leurs œuvres durant les mois précédents.
Par ailleurs, quand je rentre dans des maisons marocaines ou dans des écoles, je ne vois que très peu de bibliothèques, voire aucune. Il faudra remédier à cette situation. Ce genre de festivals a pour ambition de faire bouger les choses et d’opérer le changement dont nous rêvons.
4) Y aura-t-il dans les prochaines éditions une place pour la littérature orale et populaire africaines ?
La littérature marocaine écrite vient de l’oralité. A chaque fois que j’écris un roman, je retrouve toutes les histoires qu’on m’a raconté avant. L'oralité est omniprésente dans l’imaginaire de l’écrivain marocain ou africain et est intégrée dans la littérature écrite.
5) Comment ce festival participe-t-il à jeter des ponts et à tisser des liens entre les écrivains d’expressions différentes ?
Cette année, nous avons des "monstres sacrés" de la littérature africaine. Le fait qu’ils soient parmi nous et que je puisse lire leurs œuvres, c’est déjà un succès !
A mon avis, c’est grâce à cet échange que nous pourrons ensemble construire cet avenir commun que nous voulons tous. D'ailleurs, je suis très heureux d’avoir rencontré des Italiens qui m’ont dit vouloir faire un partenariat avec nous.
En somme, nous sommes très contents d’exporter notre littérature d’abord chez les Africains et ailleurs.